mercredi 22 janvier 2025

Les sœurs Hilton : Cirque, théâtre et humour au programme de la soirée


Il y a des soirées théâtrales qui réservent des surprises. Parfois elles sont mitigées (https://autresarts.blogspot.com/2024/11/dom-juan-ou-le-festin-de-pierre-une.html), parfois elles sont excellentes. Et le spectacle « Les sœurs Hilton » écrit par Valérie Lesort (née en 1975) fait partie des excellentes surprises. Hyper active Valérie Lesort joue aussi dans la pièce qu’elle met également en scène avec Christian Hecq de la comédie française. Et comme de bien entendu en sociétaire de la comédie française qui se respecte, Christian Hecq joue aussi dans la pièce qu’il met en scène.


L’histoire


Nées siamoises en 1908 Violet et Daisy sont le fruit d’une relation illégitime. Considérées comme des monstres du fait de leur « siamoiserie », les deux bébés sont adoptées par la sage femme qui a contribué à les mettre au monde. Mais cette femme n’agit pas par amour mais par cupidité car en les exploitant pendant toute leur enfance elle va gagner des sommes considérables. Pendant leur adolescence et le début de leur vie d’adultes c’est le célèbre « homme de force » Houdini qui va profiter de leur difformité (qui aurait pu être opérée mais que « tantine » craignant de perdre sa source de revenus a toujours refusé). Ainsi pendant presque deux heures on suit la vie des Soeurs Hilton de leur naissance à leur mort dans l’oubli et la misère. L’histoire des deux siamoises permet aussi au public d’assister à des numéros de cirques (comme par exemple le numéro de Houdini)


Une mise en scène dynamique


Valérie Lesort et Christian Hecq ont monté une mise en scène très sobre et d’un dynamisme peu commun. Ça court dans tous les sens mais sans jamais se télescoper ni gêner personne. Il faut se rappeler qu’au début du XXe siècle, les tours de force et la présentation de « monstres » (femmes à barbe, nains – ou personnes de petite taille – , hommes de très grande taille …) sont monnaie courante dans tous les cirques en activité dans le monde. Les sœurs Hilton sont donc tout à fait à leur place dans cet environnement si particulier. Fort heureusement, un siècle plus tard ce n’est plus le cas et tant mieux ; si les interventions sont risquées, il arrive de temps en temps que des siamois soient séparés leur permettant ainsi de vivre leur vie comme tout un chacun.


Cinq comédiens très en forme


Hélène Lesort, Monika Schwarz et Claire Jouët-Pastré (qui jouent en alternance) sont les seules à jouer les rôles de Daisy et Violet sans en endosser d'autres – et on peut le comprendre car ce sont deux rôles épuisants pour leurs interprètes – , Yann Frisch, Christian Hecq et Renaud Crols jouent plusieurs rôles et ils y prennent un véritable plaisir. De « tantine » – la mère adoptive des jumelles – à Houdini en passant par la mère biologique des bébés et plusieurs personnages qui ont croisé la route des Soeurs Hilton au cours de leur vie. Et on s’amuse avec eux de toutes les facéties qui fusent pendant deux heures pour la plus grande joie d’un public venu nombreux en ce froid vendredi soir de janvier.


Ce spectacle qui allie cirque et théâtre est un pur moment de bonheur tant les comédiens et le chien (qui fait l’annonce à micro en début de soirée – annonce qui fait éclater de rire toute la salle – et qui apparaît deux ou trois fois en cours de soirée) prennent un malin plaisir à jouer sur la vaste scène du théâtre. Je n’ai pas toujours ri, mais j’ai souvent souri. Je ne peux que vous recommander d’aller voir Les Sœurs Hilton.


Compte rendu, théâtre. Poitiers. Théâtre, le 17 janvier 2025. Valérie Lesort (née en 1975) : Les sœurs Hilton. Yann Frisch, Christian Hecq, Valérie Lesort, Céline Milliat-Baumgartner, Renaud Crols. Avec la participation de Monika Schwarz et de Claire Jouët-Pastré en alternance ; apparitions de Charlie l'Aboyeur. Valérie Lesort, Christian Hecq de la comédie française, mise en scène.


Crédit photo : C Gulliver Hecq

vendredi 10 janvier 2025

Benjamin Laverhne et Pierre Lottin s’éclatent en fanfare


 

En 2024, j’ai vu plusieurs très beaux films, dont certains en avant première, comme par exemple Le Molière imaginaire d’Olivier Py (https://autresarts.blogspot.com/2024/02/le-moliere-imaginaire-olivier-py-filme.html) ou encore, plus récemment, La pie voleuse de Robert Guédiguian (https://autresarts.blogspot.com/2024/12/la-pie-voleuse-un-nouvel-opus-tres.html). Si j’ai été franchement déçue par la dernière version du Comte de Monte Cristo (que j’ai trouvé vraiment trop éloigné du livre éponyme) et par Mon inséparable (que je déconseille fortement entre autres raisons à cause d’un scénario sans queue ni tête), le premier film que j’ai vu en 2025 est sorti depuis plus de quatre mois et connaît enfin un succès grandement mérité : En fanfare dont Benjamin Laverhne, l’un des trois comédiens principaux, est poitevin.


L’histoire


Chef d’orchestre de renommée internationale, Thibaud Désormeaux voyage de par le monde. La découverte d’une leucémie l’oblige à entrer en lui même, d’autant qu’il s’avère que sa sœur n’est pas sa sœur, qu’il a été adopté et qu’il a un frère biologique dont il a été séparé au moment de son adoption. La violence de ces découvertes qui s’abattent sur lui en cascade l’éloigne de sa mère adoptive et de sa sœur et lui permet de se rapprocher de Jimmy, son frère, qui, une fois passé le choc de la découverte de ce frère inattendu, consent à l’aider en lui faisant un don de moelle osseuse. Quant à Jimmy, tromboniste dans l’harmonie du village ou il a grandi, il apprend à connaître ce frère qui lui tombe du ciel.


Une distribution exemplaire


Emmanuel Courcol a confié les rôles principaux de En fanfare à un trio très inspiré. Benjamin Laverhne est un Thibaud de très belle facture, énergique, amoureux de la vie (d’autant plus quand il apprend qu’il est atteint de leucémie), très pédagogue, d’une patience d’ange avec son frère. Laverhne rend avec une aisance confondante les sentiments contradictoires de Thibaud très affecté par la maladie et très secoué par les découvertes que cela entraîne pour lui. Pierre Lottin est tout aussi brillant en Jimmy. D’abord choqué lorsqu’il découvre qu’il a un frère, il finit par l’aider avec un don de moelle osseuse mais lui conserve une certaine rancune puisqu’il a grandi dans le Nord, au milieu des corons quand Thibaud était élevé à Meudon, la banlieu chic de Paris. Cela étant dit l’amour des deux frères pour la musique les rapproche même s’ils exercent dans deux styles totalement différents, l’un dirigeant de la musique classique l’autre étant tromboniste dans l’harmonie de son village. Sarah Suco est une très belle Sabrina et donne la réplique aux deux hommes avec un bel aplomb. Ouvrière sur le point d’être licenciée d’une usine fantôme (presque tous les postes de travail ont déjà été enlevés et les syndicalistes bloquent les entrées pour empêcher que le reste du matériel disparaisse également mais en vain) elle n’a plus d’autre activité que l’harmonie pour garder un minimum de dignité. Outre ce trio de toute beauté, j’ai vu des rôle secondaires parfaitement distribués qui font honneur à Emmanuel Courcol en donnant à ce film qui mérite grandement son succès.


Si certains films connaissent un succès immédiat, comme Un p’tit truc en plus de Artus par exemple (10 806 808 entrées cumulées entre le 1er mai et le 18 décembre 2024, un record pour 2024) d’autres comme En fanfare ont besoin de temps pour démarrer (le film cumule déjà plus de 1 854 000 entrées depuis sa sortie le 27 novembre dernier). J’espère que le film poursuivra sa route pendant encore quelques semaines.


Compte rendu cinéma. Poitiers. TAP Castille, le 6 janvier 2025. Emmanuel Courcol (né en 1957) : En fanfare. Emmanuel Laverhne, Thibaut ; Pierre Lottin, Jimmy ; Sarah Suco, Sabrina ; Jacques Bonaffé, Gilbert Wosniak ; Ludmilla Mikaël, actrice ; Anne Loiret, Claire ; Yvon Martin, Anthony. Durée : 1 heure 44 minutes. Sortie nationale : 27 novembre 2024


Crédi photo : France Musique